Autrefois ; l’Architecture, l’art
suprême, se logeait académi-
quement au secrétariat des
Beaux Arts du ministère de
l’Education Nationale. A l’époque, l’admi-
nistration de la Construction “logeait”, et
les Ponts et Chaussées “aménageaient”.
La fusion des deux corps qui fit naître
l’Equipement ne possédait toujours pas
de… génétique architecturale. Le ghetto
de l’art monumental confinait l’Architec-
ture : c’est l’avènement du ministère de
la Culture Malraux qui transforme
l’image de l’Architecture en sujet admi-
nistratif à part entière, avec la création
de la Direction de l’Architecture.
À la fin des années 1970, le souci de nos
contemporains pour le cadre de vie, qui
inclut leur intérêt pour l’Architecture,
conduit à restituter celle-ci dans le quoti-
dien, c’est-à-dire, près du logement et
des aménagements construits.
À cette fin, c’est le ministère de l’Equipe-
ment qui se pourvoit de l’Architecture
en son sein. Ainsi naît, au côté de la
Direction de l’Architecture transférée, le
Service Départemental de l’Architecture.
Le législateur quant à lui, affirme par la
loi du 3 Janvier 1977, que l’Architecture,
expression de la culture”, est d’intérêt
public. Ainsi, officiellement, l’Architectu-
re pénètre le ministère. Aujourd’hui, elle
apparaît encore plus comme le lieu
transversal des activités variés de celui-
ci, aussi bien pour les ponts, les aéro-
ports, les ouvrages d’Art, les construc-
tions publiques, les infrastructures, le
logement que le patrimoine.
L’architecture, c’est ce qui donne la qualité aux constructions humaines, c’est la poésie de la matérialité bâtie
Le visage de l’architecture, son style, est l’image propre de la Nation qui la sécrète, une identité nationale en somme. Ce constat amène à penser que c’est bien à l’État, centre du pouvoir, à qui revient le rôle de fédérer les dynamiques d’architecture.
Au sein de l’Etat, le ministère de l’Equi
pement, ministère technologique, appa
raît bien comme le lieu prépondérant
pour le débat architectural contempo
rain. Mais, si le lieu paraît aller de soi, la
pratique de l’Architecture n’est pas éta
blie comme un usage général ; la situa
tion actuelle est soit celle d’une reléga
tion, ou au mieux d’un compartimentage,
soit d’une confusion générale. Pour pro
gresser, il faut chercher, et là encore, il
n’y pas de lieu de recherche clairement
établi. À titre d’exemple, le lancemer
d’une réflexion type “? acier” n’a d’abou
tissement que technologique ou ne sert
que de captage financier.
Aujourd’hui, la prise en charge patrimo
niale de l’Architecture n’est pas affirmé
et se vit seulement en terme d’obligation
légale, parce que marginalisée.
L’expérience des ZPPAUP, qui sont une
tentative d’élargissement du propos
architectural à tous les acteurs concer
nés, n’a pas reçu de véritable soutien
central par manque de moyens, et de
représentativité. La parole d’Architectu
re, que devait porter les ZPPAUP, reste
chuchotante.
Pourtant, ce devrait être un lieu de débat
et d’imagination privilégiée. Ces condi
tions font que l’intérêt du ministère pour
l’Architecture ne se perçoit qu’au travers
d’actions ponctuelles médiatisées, comme
le sont “la semaine de l’Architecture” et
“le grand prix de l’Architecture” etc…
L’architecture quotidienne
Mais l’Architecture, c’est surtout le quoti
dien de chacun de nos contemporains, et
l’administration responsable en ce domai
ne doit se doter des moyens d’une vraie
pensée permanente pour l’Architecture.
Les maires, lorsqu’ils gèrent l’aménage
ment de leur commune, n’ont à leur dis
position que les Plans d’Occupations des
Sols. Ceux-ci se révèlent avant tout des
instruments de gestion du foncier, la
dimension qualitative et culturelle de
l’espace et du bâti reste à traiter.
De plus, il s’agit d’une réflexion non seu
lement d’intérêt directement communal,
mais qui ne peut-être isolé d’un contexte
de “pays” (Echelle intercommunale
départementale).
Or, une telle prise en compte ne peut
être traitée, à ce niveau de cohérence
fédératrice, que par un Service de l’Etat
détenteur du “métier” assurant la maitrise
de la variété et de la complexité du sujet.
Cette Administration devient alors
garante de l’intérêt public, ainsi que d’une
permanence de valeur, et d’une ambition
territorialement unitaire.
Dans ce sens, il est à convenir que des
mesures de développement sont à déci-
der si les ministère veut établir la perti-
nence de son implication, et ne pas se
replier sur des missions résiduelles, ou
simplement régaliennes en ce domaine.
Les Services Départementaux de l’Archi-
tecture contiennent bien le germe de
cette possibilité de vraie politique natio-
nale de développement de la qualité du
cadre de vie.
Toutefois, actuellement, on en arrive à
une situation paradoxale ou un service
modeste, dont l’intérêt réside dans
l’approche individualisée et qualitative
des problèmes qui lui sont soumis, se
trouve débordé par la quantité.
Les Services Départementaux de
l’Architecture étant amenés à intervenir
sur des zones de plus en plus vastes,
qu’il s’agisse de maintenir des caractères
architecturaux existants ou de faciliter
l’émergence d’une architecte contempo-
raine, il conviendrait de poursuivre la
réforme antérieurement engagée avec la
création des Services Départementaux
de l’Architecture, en leur donnant les
moyens de constituer une véritable
Direction Départementale de l’Architec-
ture susceptible de compléter le rôle de
la Direction Départementale de l’Equi-
pement.
C’est le sens qui nous paraît devoir être
donné pour l’avenir de notre Adminis-
tration et celui de l’Architecture en tant
que bien public, expression de notre
Nation.
Patrice HARMEY
Architecte et urbaniste de l’État, architecte des bâtiments de France